Quand je me réveillai, ce matin là, je fus surpris de me retrouver seul dans mon lit. Dan était déjà partit. La paupière encore un peu collée par le sommeil, je tendis le bras pour pencher le radio-réveil dans ma direction. Il était tard. Presque onze heures. Mon bras retomba mollement sur le matelas et je fus tenté de me rendormir. Pourtant, on ne pouvait pas vraiment dire que la nuit dernière ait été particulièrement épuisante. Je me forçai à plier mes bras et pousser dessus pour m'éjecter hors de mon lit. Dépité, je constatai que j'avais toujours mon boxer en lycra noir, super moulant. Celui qui me faisait de superbes fesses. Dan en avait profité, pas moi.

J'enfilai mes fringues de la veille : un jean moulant gris foncé et une chemise bleu pâle avec un liseré plus foncé qui partait du milieu de l'épaule gauche. Je laissai de côté ma cravate gris satiné et l'une des vestes que Basile m'avait offertes pour mon anniversaire. J'aimais beaucoup ses cadeaux. Je pouvais mettre les ensembles complets pour le travail et une éventuelle future soirée classieuse, ou en prendre des morceaux pour un rendez vous galant, comme la veille. J'aimais vraiment ce mec. J'aurai sans doute dû lui parler de mon rencard avant d'y aller. Mais j'avais peur de me défiler en rendant ça trop réel.
Je récupérai dans mes affaires propres une chemise blanche et un pantalon en velours noir, ainsi qu'un sous vêtement de rechange. J'emballai le tout dans une serviette éponge qui sentait la grenade et partit en direction des douches.
En passant la porte, j'amorçai un geste pour retirer mon cache-oeil, mais j'avais oublié que la salle d'eau n'était pas réservée qu'à moi. Je rabaissai mon bras et préparai un sourire pour les autres membres du personnel présent. Un sourire qui disparut aussitôt que j'eus reconnu mon frère aîné. Bien que j'ai du mal à ne pas me focaliser sur sa dangereuse présence, je remarquai la présence d'une autre personne, un autre détenu. Son regard ne reflétait pas une grande intelligence et je me dis que Liam l'avait choisi précisément pour cette raison. Il ne resta cependant pas pour les festivités, car mon frère le vira. Ca aurait dû me soulager, mais je ne me sentis que plus en danger. Qu'est ce que Liam voulait me faire de si terrible pour devoir se cacher de l'un de ses suivants ?

Tétanisé par son charisme pesant, je ne cherchai même pas à m'enfuir. Je me retrouvai plaqué contre le mur moite de l'humidité ambiante, tremblant de tous mes membres et faisant des efforts monstrueux pour ne pas reluquer les tétons de Liam, qui perçaient à travers son débardeur. Depuis qu'il m'avait rendu mes souvenirs oubliés, j'étais encore plus perturbé par son existence que je ne l'étais avant.
Quand Liam passa sa main sous ma chemise, je fermai l’œil et lâchai un soupir. Mon cœur cognait si fort dans ma poitrine que j'avais l'impression de mourir entre chaque battement. Et quand sa langue remonta la ligne brutale de ma mâchoire, si près de mon tatouage mystérieux et de mon cache-oeil honteux, je relâchai mon petit ballot improvisé. J'éprouvai du désir, un désir coupable, dont je ne voulais pas mais qui ne manquait pas de venir me taquiner l'entrejambe. J'avais peur aussi. Une peur viscérale, qui, étrangement, ne faisait que renforcer mon désir. J'avais le ventre sens dessus dessous et mon entrecuisse me trahissait. Parfois, je détestais vraiment ma sensibilité physique.

Liam m'avoua que je lui avais manqué. Ce n'était pas vraiment un scoop, maintenant que je connaissais la passion qui l'animait à mon sujet. Est ce que je devais lui céder ? Il me demandait des nouvelles ? Si j'allais bien ? Mon Dieu, non. Pas du tout. Mais je n'avais pas envie de le lui dire. Je n'avais pas non plus envie de lui dire le contraire. Je voulais juste qu'il s'en aille, ou qu'il fasse ce qu'il voulait de moi puis me laisse en paix. Mais je ne voulais pas être impliqué sérieusement là dedans, je ne voulais pas faire un choix. Et si je découvrais quelque chose d'horrible sur moi ? Si finalement, je découvrais que j'aimais Liam ? D'un véritable amour passionnel ? Que ce n'était pas seulement la pression qu'il exerçait constamment sur moi ou le résultat de l'admiration qui avait grandie pendant toute mon enfance à son sujet ?

Je pris une inspiration et me forçai à le regarder bien en face. Je cherchai quelque chose d'intelligent à lui raconter, en attendant d'y voir un peu plus clair sur moi même.

« Ca va. Je me suis remis de la révolte, des coups que j'y ai pris. »

C'était vrai. Je n'avais pas été si amoché. Sur le coup, ça avait été plutôt impressionnant, mais tout s'était guéri plutôt vite. Mon bras et mon poignet étaient encore un peu fragile, mais je pouvais les utiliser sans ressentir de gêne.
Je ne pouvais cependant pas en dire autant de Liam. Je savais ce qui lui était arrivé, j'avais été témoin de son enlèvement. Ou plutôt, je savais où il s'était trouvé. Et c'était la première fois que je posais les yeux sur lui depuis les sous sols. Il avait indéniablement changé. Il ne s'agissait que d'une couleur de cheveux, mais ça témoignait d'un grand traumatisme. Il me semblait moins fier, un peu diminué. Comme si Liam était l'un de ces guerriers du passé, dont le pouvoir de combattant résidait dans leur tignasse.

« Mais toi... Ils t'ont fait des choses. »

Je n'étais pas insensible à son état. Malgré le mal que pouvait disséminer Liam sur son passage, j'avais le cœur serré à l'idée qu'on ait pu lui faire des trucs horribles. Il s'agissait toujours de mon grand frère, celui qui avait pris soin de moi quand j'étais petit et quand j'avais mis un pied dans l'adolescence. Le sage Liam. Qui avait toujours raison.

« J'ai voulu te récupérer, » avouais je piteusement.

Je n'étais pas fier de moi. Pas d'avoir échoué, mais surtout d'avoir essayé. En y allant, dans ces sous sols, je n'étais toujours pas certain d'y aller pour le tuer ou le sauver. Finalement, je m'étais perdu et Caciope, le larbin-traître de Liam, m'avait ramené au rez de chaussée dans un mutisme humiliant. Je ne l'aimais pas ce type, pour l'unique raison qu'il avait vaincu l'intelligence de mon frère. C'était stupide, mais je ne pouvais m'empêcher de ressentir ce pincement particulier. La fierté familiale. On en était rendu au bon vieux truc de gosse : je suis le seul à pouvoir toucher mon frère.

« Mais je n'ai pas réussi à retrouver l'endroit. »

Je baissai la tête, espérant qu'il ne prendrait pas ça pour une déclaration d'amour. J'avais vraiment perdu une occasion de me taire, songeais je.

Je fus surpris et presque choqué de voir ses yeux s'humidifier à cause de ce que je venais de lui avouer. Mais ça n'avait aucun sens, enfin ! Que se passait il dans sa tête ?
Je n'eus pas le loisir de me pencher plus avant sur la question que son corps se pressa avec insistance contre le mien. Mon érection s'intensifia un peu et je pencha la tête sur le côté, mal à l'aise. Je me sentais faible et humilié, plus encore que d'habitude. J'aurai aimé avoir la force de me défendre, de le repousser. Mais face à Liam, je n'étais qu'un mollusque.
Il prit mon visage dans ses mains et je fus forcé d'affronter son regard. Il m'adorait vraiment, c'en était perturbant. Je ne voulais pas de cet amour ! Pas comme ça ! Je voulais une simple relation fraternelle, dans laquelle il ne serait pas un fou furieux d'hypnotiseur tueur.

« C'est normal... Je suis ton frère... »

Je voulais me décharger, car j'étais persuadé qu'il pensait que j'allais lui céder mon cœur. Mais c'était tout simplement absurde ! Aussi attirant qu'il pouvait être, ça n'était que du sexe. Rien de plus.
Et puis, il se confia à moi. Des aveux touchants, une supplications qui me tordit le cœur comme on essore un linge trempé. Pendant une seconde, j'envisageai sérieusement de faire ce qu'il voulait. Si avec mon sacrifice il arrêtait de tuer, est ce que je ne devais pas accepter ? Pour le bien de tous ?
Non, non, bien sûr que non. N'importe qui de sensé, à commencer par Basile, me rétorquerait que je n'avais pas à faire ça pour la société, que Liam n'était pas sous ma responsabilité et encore moins ses meurtres. De plus, il était un criminel récidiviste. Il était presque certain qu'il ne pourrait pas résister à l'appel du sang bien longtemps. Finalement, tout ça n'aurait servi à rien.

Pourtant, de toutes les pensées malsaines qui tournaient dans ma tête, émergea une idée. Une vraie idée, une idée de manipulation. Un putain de plan !
J'avais repensé à l'arme que m'avait confié Basile et qui était cachée dans le tiroir de ma table de chevet. Elle était chargée et tout ce que je devais réussir à faire, c'était attirer Liam dans ma chambre. Ce n'était pas bien difficile. Mon frère devait avoir envie de moi, non ? Il voulait qu'on remette le couvert, ça me paraissait évident. J'avais toujours ce sentiment étrange, un mélange de dégoût et de désir. Mais de toute façon, je n'avais pas à aller jusqu'au bout des choses. Simplement l'attirer avec quelques baisers et caresses. Il m'attirait déjà, alors il me suffirait de ne pas penser qu'il était mon frère. Je pouvais même penser à Lu... A quelqu'un d'autre.
Tremblante, ma main remonta son bras et je me forçai à sourire. J'étais un peu crispé, mais je devais faire un effort. Et compter sur son soit disant amour. Ca devrait le rendre un peu aveugle, non ? Il ne devrait pas détecter la supercherie.

« Je vais y réfléchir. Promis. C'est une lourde décision à prendre. »

Je me mordis légèrement la lèvre. Liam était dangereux et fou. Je devais garder cette donnée en tête. Ce qui me paraissait normal pouvait être aberrant pour lui. Comme le fait de réfléchir. J'espérais vraiment qu'il goberait mes paroles et mes avances bancales.
Finalement, j'optai pour la facilité. Décidé à lui ôter tout doute qui pourrait naître dans sa tête, je l'embrassai à la sauvage. Je pensais devoir me forcer et repousser mon dégoût, mais ma langue se glissa presque d'elle même entre les lèvres de Liam pour se lier à la sienne. Je pressai même un peu plus mes lèvres et le reste de mon corps contre lui, les joues en feu.
Quand je me reculai, ignorant mon cœur qui battait la chamade, je murmurai d'une façon que j'espérais sensuelle :

« Tu veux qu'on aille dans ma chambre ? J'ai vraiment envie d'y aller. Avec toi. Juste avec toi. »

Au dernier moment, j'avais repensé à l'autre détenu. Je comptais sur l'appel du sexe pour l'éloigner de nous et me permettre de... Tuer Liam.

Ma petite manipulation semblait fonctionner, même mieux que je l'avais cru. A croire que c'était dans le sang. Liam saisit ma main et m'entraîna vers la sortie. Je m'efforçais de garder un sourire, le plus détendu possible, alors que j'avais juste envie de grimacer pour signifier mon dégoût. Pourtant, son dernier baiser avait été... Incroyablement bon. Chaud, il m'avait donné envie de me lover dans ses bras pour ne plus voir la cruauté de ce monde. Liam s'occuperait de tout, je n'aurai qu'à le suivre. A faire ce qu'il voudrait que je fasse. L'embrasser, le câliner, le laisser prendre soin de moi. Ce serait sans doute facile et je n'aurai plus jamais à me soucier des autres. Comme Luckas. En pensant à lui, mon estomac se tordit. J'étais partagé entre la déception et le brûlant désir que je ressentais toujours pour lui. Il me donnait l'impression de me consumer de l'intérieur.

Devant la salle d'eau, nous trouvâmes l'autre détenu, accroupi au sol. Je le regardai avec étonnement par dessus l'épaule de Liam. Il nous espionnait ? C'était glauque ! J'avais hâte que Liam le dégage, pour ne plus avoir peur de sa présence. Mais peut être qu'il allait l'inviter ? Il était peut être un adepte des parties à trois.
Quand il l'embrassa, je blêmis et crus, pendant un instant, que c'était vraiment ce que voulait Liam. Putain non ! Même avec toute la volonté du monde, je ne pouvais pas faire semblant d'être attiré par deux personnes, dangereuses, dont l'une avait l'air d'avoir dix ans. Heureusement, mon frère se contenta de le renvoyer dans leur cellule. « Leur » cellule ? Avais je bien entendu ? Un geyser brûlant monta de ma poitrine jusqu'à colorer mes joues. Mes sourcils s'infléchirent sous une soudaine poussée de colère. Je ne comprenais pas l'existence de ses sentiments et suivis Liam dans le couloir. Il s'arrêta devant ma chambre et se tourna vers moi. J'avais toujours ma tête perplexe et mécontente. Est ce que j'étais jaloux ? … Bon sang, il me semblait bien que j'étais jaloux ! Quand Liam m'expliqua qu'il savait où je logeais, je le fixai un moment, sans comprendre. Ah oui ! Il croyait que c'était la raison de mon expression !

« Ah... Bien sûr. »

J'avais un peu perdu de vue mon rôle. Tant pis, je ne pouvais plus me rattraper sans que ça paraisse vraiment suspect. Passant devant mon frère, dont le contact, même léger, m'arracha un frisson érotique, j'enfonçai brutalement la clef dans la serrure. Mon entrejambe se dressa fièrement contre ma cuisse. Bon sang, j'avais vraiment l'esprit mal placé. Je m'empressai de déverrouiller la porte et pénétrai – non ! - dans la chambre. Au moins, elle était propre et rangée. Pas grand chose à se mettre sous la dent pour Liam donc. Il ne pourrait pas m'analyser de fond en combles... Bordel ! Au moins, je n'aurai pas vraiment à simuler.

Sous l'énervement, je balançai mes clefs sur le petit bureau sur lequel j'avais déposé un magnolia rouge vif. M'approchant de mon lit, le cœur battant à tout rompre, je repérai un sous-vêtement, sur le sol, qui ne m'appartenait pas. Il était à Dan. Je ne savais même plus comment il avait atterri là, peut être qu'on avait fait plus de choses que dans mes souvenirs. Bon, Liam ne devrait pas suspecter qu'il n'était pas à moi mais, dans le doute, je le poussai du pied jusque sous le lit. J'étais à un demi pas du tiroir de ma table de chevet. Je n'avais qu'à me pencher en ouvrir le tiroir, récupérer l'arme et...
Non, non. Il pourrait suspecter quelque chose. Je devais le faire patienter. Par exemple, je n'aurai qu'à prétexter vouloir prendre une capote. Et là...
Je fis volte face pour me retrouver en face de Liam. A ma grande surprise, il était beaucoup plus proche de moi que je ne l'avais escompté. Et j'étais incroyablement nerveux. Je n'étais plus si sûr de réussir mon coup. Quant à lui... Il semblait vraiment prêt à y aller. Je n'aurai sans doute pas grand chose à faire.

Je savais que j'aurai dû me jeter à son cou, mais je n'y arrivai pas. Du moins, je croyais ne pas y arriver si j'essayais. Alors, maladroitement, je m'allongeai à demi sur le lit, en appui sur mes coudes.

« Tu viens ? »

Ma voix était chevrotante et je n'étais pas du tout sexy, alors que j'essayais de l'être. N'importe qui m'aurait trouvé pathétique et aurait simplement quitté la chambre.

Il me sourit. J'étais plus en confiance, il était tombé dans le panneau. Et il me rejoignit sur le lit ! Mon cœur accéléra le rythme de ses battements. Je ne pus empêcher mes lèvres de s'étirer, mais cette fois, ce n'était pas pour faire la grimace. Elles présentaient un écho de la bouche de Liam. Une vague d'excitation commença à me faire haleter. Je ressentais une certaine impatience. Quand nos lèvres se joignirent, j'avais presque oublié mon plan. J'étais même... oui... plus empressé que Liam. Je dévorais sa bouche, allait chercher sa langue avec la mienne. Et puis, il recula. Je lui jetai un regard accusateur. Quoi ? Il préférait ce petit blond ? Il doutait de son attirance pour moi ? Mais Liam n'avait toujours voulu que moi, c'était à cause de ça qu'il avait torturé Luckas, qu'il avait fait... Tout ça ! Il me l'avait dit lui même ! Alors pourquoi est ce qu'il ne me prenait pas maintenant ? Pourquoi est ce qu'il me faisait patienter, comme s'il réfléchissait ? Comme s'il était possible qu'il se refuse à moi ? C'était tout simplement inacceptable et impossible !
Je fus rassuré quand il commença à me déshabiller. Je frémissais sous le contact léger de ses doigts sur ma peau brûlante. Voilà qui était mieux. Quand il s'attaqua à mon pantalon, je fermai les yeux et cherchai à me détendre. Je devais le dire, maintenant. C'était le bon moment. Je devais lui proposer de prendre un préservatif. Et alors, je... Oui, je prendrai cette arme. Même si ce n'était plus le scénario qui me faisait le plus envie.

Quand il lâcha son ultimatum, je me sentis soudain aussi refroidit que s'il m'avait balancé un seau d'eau glaciale à la figure. Je rouvris les yeux et me figeai, une boule dans la gorge. Quoi ? Il avait compris ? Comment ? … Oh oui, j'étais un piètre acteur.
Je pris le temps de la réflexion. Est ce qu'il voulait se laisser faire ? Ca n'avait aucun sens ! Il croyait sans doute pouvoir me contrer, éventuellement m'hypnotiser.
Sans quitter le visage de Liam de l’œil, je tendis le bras sans brusquerie sur le côté et ouvrit juste assez le tiroir pour en sortir l'arme de Basile. Je déglutis quand mes doigts caressèrent la crosse en métal. Pour ensuite attraper la vraie boîte de capotes que je cachais là. Du dos de la main, je refermai le meuble de chevet. Mon cœur battait à tout rompre et mes pensées étaient toutes entières dirigées vers ce blondinet qui partageait la cellule de Liam. L'idée qu'il puisse éventuellement partager son lit me révoltait. Mon frère était mien. C'était dégoûtant et je n'aimais pas ça, pas normalement. Mais aujourd'hui, ne serait ce qu'aujourd'hui, qu'une fois, j'avais besoin qu'il ne pense qu'à moi. Luckas m'avait menti, avait joué avec mes sentiments. Dan ne me rappellerait sans doute jamais et de toute façon, je l'avais juste rencontré sur Internet. Mais là, tout de suite, j'avais besoin d'un élément stable et désirable. Qui me désirait aussi ardemment.

Je posai la boîte à côté de nous, tendu à l'extrême et excité comme une puce. Je n'en revenais pas de ce que je m'apprêtais à faire, du choix insensé pour lequel j'avais opté. Basile aurait été présent, il... Mais Basile n'était pas là. Je n'avais pas à faire face à sa morale et sa bonne conscience. J'aurai tout le temps de me confier à lui plus tard. Il me ferait la leçon, je me repentirai et regretterai, mais au moins, j'aurai eu une remontée de morale grâce à Liam. Je pouvais bien l'utiliser, pour une fois. Lui ne se gênait pas.

J'enroulai mes bras autour du cou de Liam et l'embrassai, appuyant mon baiser de façon à lui faire comprendre mes intentions et mes désirs. Je voulais de la puissance, de la bestialité. Qu'il se donne tout entier à moi, rien qu'à moi.

« Dévore moi... » murmurai je tout contre ses lèvres avant de repartir à l'assaut de ces dernières.

Il prononça mon nom et sa voix provoqua un nouveau frisson le long de mon échine. J'étais incroyablement excité et j'avais bien l'impression que c'était justement parce que je venais de passer la ligne de l'interdit. Et cette fois, il n'y aurait pas de retour en arrière. Je savais que ce n'était pas la première fois et que Liam ne me ferait pas oublier. Je n'étais pas bourré, rien n'effacerait cette heure de ma tête. J'étais grisé. J'avais enfin le contrôle sur quelque chose. Sur mon frère. Je pouvais en faire ce que je voulais, je l'avais mis à mes pieds. Il allait me baiser comme je le réclamerai, je prendrai du bon temps et quand je poserai de nouveau mes yeux sur le visage de Luckas, je serai satisfait parce qu'il n'aurait pas été le seul à tricher. Je serai même plus que ravi d'avoir fait pire.

Petit à petit, Liam me déshabilla. Je haletais sous le frôlement de ses doigts et l'avidité de sa langue. Mes doigts se perdaient dans sa chevelure décolorée, tiraient parfois un peu sa tignasse et l'emmêlaient. Je caressais sa nuque, ses épaules. Mon corps se contorsionnait sous lui et je gémissais sans retenue. L'outrage était complet. Envers qui, je ne savais pas. Mais ça me faisait plaisir qu'il existe. Et puis, tout ralentit. Liam jouait avec l'élastique de mon sous vêtement. Je fronçai les sourcils. Pourquoi ne s'en débarrassait il pas ?
Je souris en comprenant qu'il voulait jouer. Je n'étais pas vraiment contre en fait. J'étais même plutôt content de pouvoir faire durer le plaisir. Quand il me demanda si je voulais être débarrassé de mon boxer, je hochai frénétiquement la tête en étirant mon sourire. Oui, bon Dieu, oui ! Je me sentais serré, compressé même. Ce vêtement mettait en valeur mes fesses mais il était du genre à tuer les spermatozoïdes dans l’œuf. J'étais persuadé qu'avec une stimulation maximale, je n'aurai pas pu jouir.
Pour toute réponse, Liam descendit son visage pour lécher mes tétons. Je lâchai un grand gémissement sonore et obscène, mes doigts tordirent les draps chiffonnés du lit. J'étais à deux de ces doigts de me déshabiller tout seul, tellement la tension devenait insoutenable. Ca empira encore quand Liam trouva que c'était une bonne idée de passer sa langue sur mon entrejambe. Par dessus mon boxer. Je me mordis violemment la lèvre pour retenir un autre gémissement, qui risquait d'ailleurs de se changer en cri.
Il cessa un instant sa torture et me regarda. Je baissai les yeux sur lui et hochai de nouveau la tête, avec encore plus d'empressement que précédemment.

« Oui, oui. Fais le. Liam. »

J'étais enfiévré. Tout ce à quoi j'aspirais, présentement, était la liberté de mon entrecuisse compressée.

Jjaekkak, Jjaekkak

Mes mains trembleraient presque de ce contact délicieux avec la peau d'Ulrick. Est-ce qu'on a déjà eu sensation plus exquise que celle des plaisirs de la chair, quel qu’ils soient ? Ses baiser me rendent déjà l'homme le plus heureux du monde mais le toucher de sa peau velouté à la douce senteur de lilas me transporte au delà de tout ce que j'ai pu connaître avant ou après l'avoir touché. Ah … Quelle douce souffrance, quelle agréable douleur que de partager la couche de l'être aimé quand on sait qu'il ne vous rendra jamais vos sentiments. Bien sûr que je le sais. Oh je viens tout juste de le réaliser mais oui, je sais qu'Ulrick ne m'aimera jamais. Je l'ai réalisé au moment même où ses lèvres ont touché mes lèvres. Je voudrais oublier cette certitude mais je sais  qu'elle restera ancrée dans mes pensées à jamais. Ce qui est su ne peut pas être effacé. Ulrick ne m'aimera jamais comme je l'aime.
Ma langue n'est pourtant jamais rassasié de ce goût salé. Je sais que ce sera l'unique et dernière fois que mon frère se donnera à moi. Ses mains, sa voix, son goût, ses gémissements, ses pleurs … Tout ça, tout ce qui fait l'essence de l'amour qu'il aurait pu me porter disparaîtra aussitôt qu'il aura joui parce qu'au fond, tout ce qu'il voit en moi c'est un frère trop attaché et une présence néfaste pour lui. Parce que je ne suis pas celui qu'il mérite et … oh  … je viens tout juste de le réaliser. Je pourrais pleurer en ce moment même, mettre fin à mes jours. Je réalise enfin quel mal j'ai fait à mon frère. Dieu … je suis un monstre. Posant mon regard échaudé sur mon frère, je réalise aussi quelque chose. Je suis un monstre mais pas autant que lui … Moi qui lui ait toujours été dévoué je n'ai toujours eu droit qu'à des mots méprisants et des regards dégoûtés. J'ai toujours été tourné vers lui et sans doute que j'ai favorisé le monstre qu'il est devenu. Celui que j'aime.
Un monstre d'égoïsme, un homme qui rejette la faute sur les autres et qui a une forte tendance à foutre le feu pour calmer ses nerfs. Un destructeur en puissance, un homme instable. Voilà celui dont je suis tombé amoureux. Oh à bien y réfléchir, il en a toujours été ainsi. Moi derrière lui, le suivant en espérant une friandise comme un chien obéissant et blessé sans cesse. Je crois que c'est lui qui a créé l'abomination que je suis. Je crois que c'est lui la cause de tous mes meurtres. J'ai fait tout ça pour lui, pour nous faire une vie, à ma façon mais il n'a jamais réussi à me comprendre. Si quand nous étions petits, il avait daigné m'accorder un regard, un sourire... Peut-être que je serais une personne équilibrée. Peut-être bien que toutes ces vies auraient été épargnées et que nous serions heureux, comme des frères. Plus il me rejetait, plus je m'accrochais. Il m'a rendu accro par ses refus.
Mais je suis heureux. Je suis heureux parce que cette après midi, il m'a choisi moi pour se défouler, je suis heureux parce qu'il a fait ce choix en connaissance de cause, en sachant qui je suis et ce que cela implique. Il sait que ça va me faire mal quand il me quittera sans un regard, il sait que je pourrais mourir pour un de ses regards et il sait qu'il ne fait ça que pour se vider la tête de ces problèmes amoureux que ce gardien lui a causé. Il sait aussi qu'il se sentira sale mais … Il aime se sentir sale au fond. Il aime se punir, se plaindre, se complaire dans son malheur, il ne vit que par ça. Cet après midi il m'a choisis moi, je sais que je vais souffrir et pourtant … Mon cœur pourrait exploser de bonheur. Pourquoi ? Parce que j'ai vécu vingt neuf ans juste pour ce moment.
Si c'est triste ? Oui sans doute, ne vivre que pour une heure ou deux c'est comme gâcher sa vie. Mais je vais vous dire une chose : ça en vaut largement la peine.
Sa voix me fait sourire et verse une larme, légère. Ulrick a mon cœur, il le sait. Il sait qu'il pourra se donner à moi dès qu'il en aura en vie. Et en fait, ce n'est pas si terrible d'être torturé et manipulé ainsi. Parce que je l'aime.

« Tu en es sûr ? »

Je lui retire son sous-vêtement avec une lenteur contrôlée et presque insoutenable, sentant sa peau brûlante frémir sous le bout de mes doigts et la pointe de ma langue. Après trois longues minutes de déshabillage, je finis par prendre son sexe entre mes doigts avant de venir en lécher le bout, toujours assez lentement pour qu'il soit frustré. Puis je relâche le tout quand je sens qu'il est sur le point de m'agresser. Je me redresse et vient à califourchon sur lui, frottant mon membre durci contre le sien à travers le tissu rêche de la combinaison.

« Je suis toujours habillé au cas où tu ne l'aurais pas remarqué. »

Ma bouche vient s'unir à la sienne et mes mains se plongent dans ses cheveux alors que mes coups de bassins se font plus pressants. J'ai tellement envie de lui en ce moment même que je sens la tête me tourner et mes membres s'engourdir.

- - - -  

« Liam, je t'aime tu sais ? »

Un instant de silence. Mon regard s'était porté sur lui et j'avais éclaté en pleurs. Ulrick … Pourquoi est-ce que j'avais du utilisé l'hypnose sur mon frère pour entendre ces quelques mots. Cela avait fait de mon seizième anniversaire le pire jour de ma vie. J'avais alors réalisé que c'était moi la poupée d'Ulrick.

Bon sang, mais oui j'en était sûr ! Qu'est ce qu'il attendait ? J'allais finir par devenir violent s'il continuait à me faire languir comme ça. A force de me tortiller comme ça, j'allais finir par m'emmêler dans les draps. Finalement, la libération vint, mais elle ne se pressa pas, loin s'en fallait. Liam prenait vraiment son temps. Des frissons remontaient mes jambes au contact de ses doigts, alimentant mon excitation un peu plus. Comme si elle en avait besoin.
Ca me sembla durer une éternité puis, enfin, mon boxer atterrit sur le sol. J'en soupirai même de soulagement tellement le supplice avait été intense. Mais ce soulagement ne fut que de courte durée. Quand Liam s'empara de mon sexe pour le lécher avec la retenue la plus indécente de toute l'histoire de la sexualité, je me cambrai de frustration en me tenant aux draps. Dieu, mais à quoi est ce qu'il jouait ? … Oui, il jouait. Je devais me focaliser là dessus. Liam me voulait tellement, il comptait faire durer le plaisir. Sauf que c'était moi qui en pâtissait et que, de mon point de vue, ce n'était pas si drôle que ça. Ce qui ne m'empêchait pas d'en sourire largement.

Liam mit fin à ce nouveau supplice et se plaça à califourchon sur moi. Oh... J'étudiai cette nouvelle idée de disposition. Depuis le début, j'avais pensé être inactif, me laisser pénétrer et défoncer le cul. De préférence par derrière, à quatre pattes, pour pouvoir le shooter pendant l'acte, quand il se méfierait le moins. Sauf que mon désir, incendiaire à présent, me commandait plutôt de me perdre en Liam. Je me mordis la lèvre alors qu'il se frottait contre moi. J'avais envie de le saisir, de toutes les façons possibles. C'était rare, mais je voulais être la force cette fois. Prendre des initiatives. Et après sa remarque, il était évident qu'il était plus que temps que je m'y mette.

Alors que nous étions bouche contre bouche, pressés l'un contre l'autre, je m'activai, réellement. Sans pour autant arrêter de l'embrasser, toujours plus fougueusement et avec empressement, je fis passer son débardeur par dessus sa tête. Ayant accès à son torse nu, je fis glisser mes doigts sur sa peau. Elle était chaude, douce. Je m'attendais à ce qu'elle soit aussi fraîche que celle d'un reptile et rêche comme leurs écailles. Mais la prison ne semblait pas l'empêcher de prendre soin de lui correctement. Ca n'aurait pas dû m'étonner : il était doué pour manipuler les gens, non ?
Je m'attardai sur l'un de ses tétons et le pinçai légèrement, alors que mon autre main explorait son dos et ses reliefs. Il était plus musclé que je me l'étais imaginé.
Ce petit interlude terminé, je retrouvai ma fougue et le débarrassai de sa combinaison. Pour me faciliter la tâche, j'avais dû le retourner sur le dos et enchaîner plusieurs positions pas très glorieuses, parce que j'avais ressenti le besoin puissant de ne pas m'éloigner de sa bouche plus de quelques millièmes de secondes. Il se retrouva nu plus vite que moi, je ne disposais pas de son infinie patience. J'étais déjà à bout avant de commencer.
Je pris néanmoins le temps d'observer sa nudité offerte à mon œil, redressé au dessus de lui. Les battements de mon cœur s'accélérèrent et je déglutis, la bouche sèche. Pourquoi est ce qu'il me faisait soudain si envie ? Non, je n'avais pas le temps de m'attarder là dessus. Je plongeai de nouveau sur son visage pour lui arracher autant de baisers que je le pouvais. Deux de mes doigts massaient son entrée, à fin de s'y introduire. Je frottais mon bassin contre sa cuisse, marquant mon avidité comme un animal son territoire. L'un de mes doigts passa la barrière de son intimité et je m'en servis pour élargir le passage aussi vite que possible, pour y introduire le second. Quand je le fis, je mordis violemment la lèvre de Liam. Et quoiqu'on puisse en penser, ce n'était pas pour me venger de lui d'une quelconque manière. J'aimais juste la violence au lit.
Une fois en lui, j'agitai brutalement ma main contre lui, allant et venant sans douceur en Liam. J'avais conscience de franchir une limite de manière plutôt définitive, mais je n'en avais strictement rien à foutre.

Luckas et ce que je lui reprochais de m'avoir fait ? Ca ne comptait plus. Les meurtres de Liam ? Non plus. Tout ce qui m'importait, c'était ce qui se passait dans cette chambre, maintenant. Avec mon frère. Et il pourrait y avoir un ouragan là dehors, je ne partirai pas d'ici avant d'en avoir fini.

Je n'étais pourtant pas une bête sauvage. Je décrochai un peu de la langue de Liam et me forçai à reprendre assez de souffle pour parler. J'avais un peu ralenti les mouvements de ma main, histoire de permettre à Liam de me répondre. Ca pouvait être pratique, éventuellement.

« Dis moi quand tu es prêt, » soufflai je contre ses lèvres.

J'aurai pu y aller, me fier à mon instinct. Mais quelque chose me retenait d'agir ainsi. Je voulais prendre tout particulièrement soin de Liam. Ou quelque chose comme ça. Peut être que je voulais juste le garder en forme. Pour pouvoir recommencer, toutes les nuits s'il le fallait.

Mes mains parcourent toujours sa peau chaude alors que je ferme les yeux de délices. J'ai envie qu'il devienne violent, qu'il m'aime comme je devrais l'être. Je n'espère pas trop de cette coucherie, je sais bien qu'il ne peut pas m'aimer comme je l'aime, que c'est en dehors de ses capacités. Il a raison, si son amour pour moi devait le détruire comme mon amour pour lui me détruit, je ne pourrais le supporter. Ma mère avait raison au final. Tout ce que j'ai fait était vain.
La main sur son sexe durci à l'extrême, je me contente de l'effleurer à quelques endroits que je sais irrésistibles. Et je sais bien qu'il ne peut qu'aimer. Sans doute que cela le dégoûte un peu -je suis son frère- mais au final, s'il oublie tout cela et ne fait que profiter du moment, j'aurais au moins réussi à lui créer un bon souvenir, quelque chose de positif. Une bonne chose entre nous.
Cette frustration commune me hérisse de partout. J'ai envie de lui sauter dessus et de m'empaler sur lui mais non, ces moments ensemble, en fusion parfaite, il n'y a pas des masses. Je dois essayer de faire durer le plaisir le plus possible, quitte à l'enfermer dans cette chambre pour deux jours et deux nuits. Je ne veux plus le quitter. Je ne veux plus que lui, au moins pour un petit temps, même si au final, je dois le laisser dans les affres de sa conscience. Même si au final, il finira par oublier qu'il a été en moins. Parce que ce souvenir lui donnera la nausée.
Ses mains finissent pas m'activer alors que sa langue explore toujours les tréfonds de ma bouche, caressant ma langue, laissant un filet de bave couler le long de son menton. Sexy. Et puis, je me retrouve sans débardeur. Ses mains sont toujours aussi douces, Ulrick est vraiment un homme soucieux de son corps.
Sa main sur mon téton me fait lâcher un gémissement des plus obscènes et je commence à durcir de plus en plus douloureusement. Je me sens à l’étroit là dedans. Je voudrais … je voudrais qu'il me libère. Oh, je ne vais pas lui faire le plaisir de me déshabiller moi même, il faut qu'il me rende la pareille. Je veux qu'il me dénude pour qu'il ne crie pas au viol ensuite.
Et il me libère, avec une passion dont je ne le croyais pas capable. Ses lèvres ne quittent pas les miennes et pourtant, je me retrouve très rapidement nu, sur le dos. Et il m'observe, de ses yeux mordorés qui me donnent tellement envie de l'attirer à moi et de le maltraiter.
Tout allait si vite avec lui, voilà qu'il commençait déjà à me pénétrer, douloureusement. Lui qui était d'habitude le soumis aurait du savoir à quel point une pénétration sans lubrifiant fait mal. Et sa morsure ne fait pas passer la douleur. Le goût du sang envahit bientôt ma bouche même si une seule goutte est tombée. J'aime ce goût, mais je préférerais que ce soit le sang de mon frère, que je trouve plus sucré.

« Espèce de … barbare...»

J'halète plutôt difficilement, à cause de mon excitation, de ma frustration et de la douleur de recevoir les doigts d'Ulrick en moi. Ma dernière pénétration date d'un mois et cela commence à se faire sentir. Ulrick est un enfoiré mais j'aime ça, atrocement.
Ma tête rejetée en arrière, je gémis et je crie sans m'arrêter, mes ongles plantés dans le bras gauche d'Ulrick. Oui, continue ! Mes yeux sont fermés si fort que je vois des étoiles de couleur dans le noir de ma cécité temporaire. Fais moi mal ! Je crois même que je bave un peu. Je n'ai plus conscience que du corps d'Ulrick contre le mien. Je suis si absorbé par lui que je ne pourrais même pas remarquer qu'on me plante un couteau dans la tête. Ma conscience du monde et de mon corps ne va pas si loin. Et puis je rouvre les yeux, des yeux embués de larmes. Tout mon corps est recouvert d'une fine couche de sueur. L'effort, la douleur, l'envie. Tout cela mélangé fait rater quelques battements à mon cœur qui semble sur le point de lâcher. Si je mourrais là, je pourrais en être heureux.
Quand je suis prêt ? Mais je suis déjà prêt depuis longtemps. Ne sois pas bête Ulrick, tu le sais toi même, je n'attends que toi depuis déjà si longtemps …

« Vas y … Doucement. »

Je ne voudrais quand même pas mourir de douleur alors que je goûte enfin à tout ce que j'ai toujours voulu. J'attrape mon frère par la nuque et me hisse jusqu'à lui. Oui … Fais moi mal, prends moi, possèdes moi, fais tout ce que tu veux de moi. Je veux t’appartenir.

Je savais y être allé fort, mais je fus surpris de sentir un goût métallique sur ma langue après avoir mordu Liam. Pour autant, ça ne m'arrêta pas, même lorsqu'il me traita de barbare. J'en souris même et léchai la petit trou que j'avais malencontreusement créé. Juste avant de reprendre mes va-et-vient plus que brutaux. Oui, j'étais un barbare. Mais Liam aimait ça. Ses gémissements et ses cris me galvanisaient. Je n'avais de cesse de lécher la sueur qui recouvrait sa gorge, ses clavicules, s'attardait autour de ses tétons que je léchais et mordillais avec avidité. Je voulais lui faire un effet dévastateur, je voulais qu'il se rappelle de ce moment pour le restant de sa vie. Cette coucherie le marquerait à jamais, elle ne serait pas vaine. Ce serait un véritable souvenir. Et jamais plus Liam ne pourrait s'accrocher à quelqu'un d'autre sans y penser. J'avais bien conscience de l'égoïsme et de la violence d'une telle pensée, mais je ne pouvais m'y dérober. Je voulais saisir ce qui était à ma portée pour ne plus jamais le lâcher.

Quand je lui demandai s'il était prêt, Liam, haletant, me demanda d'agir. Mais en douceur. Je pris alors une longue inspiration et cessait les mouvements de ma main. Me calmer, je devais me calmer. Lentement, j'extirpai mes doigts de son intimité et les léchai sans plus me presser, les introduisant dans ma bouche comme pour m'en délecter le plus possible, le tout sans quitter le visage de Liam de mon œil.
Il se hissa à hauteur de mon visage, m'attrapant par la nuque. Je recommençai alors à l'embrasser, plus profondément et moins fougueusement qu'auparavant. Ca y était. Mon excitation était à son paroxysme et mon cœur se serrait, impatient d'aller au fond des choses.
Je saisis les hanches de Liam et pressai mon sexe contre son entrée. D'une secousse des reins, je fus en lui. Un gémissement franchi mes lèvres entrouvertes alors que je goûtais au soulagement que ce simple début de pénétration me procurait. Lentement, je me mis à aller et venir en lui. Toujours un peu plus profondément. Mes coups de bassins, légers, étaient ponctués de baisers plutôt tendres et de caresses sur l'ensemble de son corps, aléatoires. Mes doigts le parcouraient au gré du hasard et j'en savourais chaque parcelle.

J'étais finalement parvenu à me glisser entièrement en Liam et mes gémissements allaient de paire avec mes coups de reins, toujours lents. Mais je commençai à souffrir à nouveau d'impatience. Je m'aperçus alors seulement à quel point je tremblais d'excitation, à quel point j'avais chaud et produisais autant, au moins, de sueur que mon frère.
Je basculai alors sur le dos en emportant le corps de Liam, qui se retrouva allongé sur moi. Je remontai mes genoux, l'obligeant à écarter les cuisses et le ramenant un peu plus contre moi. Mes coups de reins devinrent plus appuyés et brutaux, mes ongles striaient son dos entre deux caresses. Je haletais et ne parvenais plus à l'embrasser sur la longueur. J'avais besoin de tellement de souffle. En même temps, il m'empêchait de respirer convenablement, mais je n'aurai échangé cette position pour rien au monde.

Mes lèvres tirèrent un peu le lobe de son oreille et ma langue le lécha à la suite. A lui de prendre les commandes. N'était il pas censé être un bon amant ? Il était temps de le prouver autrement qu'en me faisant languir.

Liam ne mit pas longtemps à s'activer. Et ce qu'il fit manqua de me provoquer une crise cardiaque. Il me faisait mal, il savait que j'adorais ça ! Ou peut être pas... ? Je ne savais plus, c'était peut être le hasard qui voulait qu'il aime me faire souffrir. Nous étions compatibles, je ne pouvais empêcher cette pensée de tourner dans ma tête pendant que mes gémissements devenaient de plus en plus audibles, presque assourdissant, et de plus en plus obscènes. Quand il se déhancha sur moi et me griffa l'intérieur de la cuisse, je soulevai soudainement mon bassin. Liam, qui venait de se laisser tomber sur ma verge, dût le sentir passer. Le plaisir qui en ressort me fait attraper les cuisses de Liam, pour les serrer. La tête en arrière, j'en étais à la limite de hurler mon plaisir. Je donnais des coups de bassin chaotiques, ne me contrôlant plus. C'était vraiment une des meilleures...
Bien que mon corps continuait à réagir violemment aux caresses de Liam, mon esprit vagabondait sur un territoire douloureux. Je repensais à cette fois, cette unique fois, avec Luckas. Mon cœur se serra un peu. J'étais complètement imbibé d'alcool, alors mes souvenirs n'étaient pas très nets. Mais j'en avais quand même gardé une excellente impression. Mais était ce mieux ou moins bien que ce qui était en train de se passer ? A vrai dire, j'avais terriblement peur de la réponse.

Liam donna un coup de bassin qui me fit revenir au moment présent et je me concentrai de nouveau sur l'action. De toute façon, je ne voulais pas connaître la réponse, à quoi bon me pencher là dessus ?

« Mens moi. S'il te plaît, juste cette fois. »

Lui mentir ? Pourquoi ? Haletant, le visage en sueur, je fixai mon œil sur Liam. Que voulait il que je lui dise. Il esquiva alors mon regard en fermant les yeux. Et puis, la solution s'imposa à moi, évidente. Là-dessus, il voulait que je lui mente là dessus.
Je cherchai au fond de moi les sentiments que j'avais pu ressentir. Je voulais lui donner ce qu'il voulait. Une fois, juste cette fois. Il était lui même en train de faire quelque chose pour moi, après tout. Et puis, je me sentais un peu coupable d'avoir vraiment eu l'intention de le tuer.

« Je t'aime, L... Liam. »

Ma gorge se noua. J'avais failli déraper. J'étais peut être allé chercher un peu trop loin mes sentiments. Pour dissiper mon malaise, j'attrapai Liam à l'arrière de son crâne et le ramenai à ma bouche, me hissant sur un coude. Je le dévorai de mes baisers, reprenant mes coups de reins inquisiteurs.
Je nous fis rouler de nouveau, me plaçant une seconde fois au dessus de lui. Le serrant tout contre moi, l'enlaçant amoureusement, je tentai de faire passer plus que du désir dans mes gestes. Pour autant, je continuais de le pilonner à la sauvage, gémissant et criant contre ses lèvres que j'aimais goûter de la pointe de ma langue. J'en vins même à murmurer son nom, sans hésiter.
Après une soudaine et brutale accélération, je me déversai alors en lui, sans retenir mon râle de jouissance. Tremblant de la tête aux pieds, je nichai mon nez dans son cou, attendant de reprendre mes esprits et mon souffle. Et puis, soudain très inspiré, je chuchotai, sans vraiment me contrôler et sans y avoir réfléchi :

« Je t'aime, Liam. »

La tension dans mon corps s'apaisa petit à petit et je me laissai glisser sur le côté. Malgré le fait que j'avais incroyablement chaud et que je baignais dans ma propre sueur, j'enlaçai Liam, me collant à son dos et respirant son parfum exacerbé par l'exercice physique. Ma ventre glissa sur son ventre collant sans que je retire mes doigts et je fermai les yeux. Le sommeil me gagnait peu à peu, mais j'étais encore beaucoup trop excité par ce qui venait de se passer pour m'endormir vraiment. Le mieux dans tout ça était que je ne me sentais coupable de rien, je ne me posais aucune question. Mon esprit était comme vide, tous mes soucis enfermés derrière une porte dont je ne possédais plus la clef pour le moment. J'étais juste en pleine félicité. Avec Liam. Mes sentiments pour lui étaient ceux à la fois d'un amant et d'un frère. Et je m'en contentais pleinement.

Liam brisa cette félicité. Il prononça des mots qui me firent l'effet d'un couperet sur ma gorge. Pourtant, celle ci se noua et je déglutis, avec difficultés, me forçant à rouvrir l’œil. Adieu, la tranquillité. A nouveau tourné vers moi, Liam me souriait. Mais comment pouvait il encore sourire alors qu'il venait de me demander de le tuer ?! Révolté, je me relevai sur un coude et le fixai sans cacher l'horreur qui me saisissait et qui s'imprima sur mon visage. Non. Non, non, non ! Je blêmis quand il ouvrit le tiroir de mon meuble de chevet pour en sortir l'arme de Basile. Il savait...
Sans que je me souvienne comment, je me retrouvai la main sur la crosse, prêt à tirer dans le ventre de Liam. J'étais en pleine panique, mais je ne pouvais pas retirer ma main. Liam s'en assurait. Il continuait à me regarder avec cette bienveillance, ce calme olympien. Et moi, je réfléchissais. Oui, j'hésitais à appuyer sur la gâchette, moi dont la semence coulait encore entre ses cuisses. Pour nous deux. Je devais le faire. Pour me libérer, mais ce que voulait dire Liam, c'était que cela le libérerait aussi. Il souffrait donc tellement de son amour pour moi ? J'avais tellement de mal à le concevoir. Je n'avais jamais vécu de situation équivoque. Oh, j'aurai peut être pu avec Luckas, c'était bien parti avant que Liam n'intervienne. Peut être que, oui, peut être que si mon frère n'avait pas torturé Luckas pour lui faire avouer son infidélité, nos sentiments auraient assez mûri pour qu'il quitte sa fiancée. Mais ça, je ne le saurai sans doute jamais. Un coup dans l'eau. Liam s'en était assuré.

Je me remémorai alors tout le mal qu'il avait pu occasionner dans ma vie, sans même parler de toutes les autres qu'il avait détruites, piétinées sans vergogne à coups de dés. A cause de lui, j'avais perdu beaucoup de petits amis. A cause de lui, mes parents me détestaient. A cause de lui, j'étais sujet à de nombreuses psychoses, comme cette pyromanie plus vraiment latente, ou mon masochisme honteux. A cause de lui, j'avais perdu un œil et mon travail pour venir m'enterrer dans cet Enfer. A cause de lui, j'avais peut être aussi perdu l'homme de ma vie. A cause de lui, j'avais failli mourir d'une tumeur cérébrale. Tout ceci et sans doute plus encore, qui ne me revenait pas à l'esprit sur le moment.

Ma main qui jusque là tremblait sur la crosse du pistolet se raffermit. La moitié gauche de mon visage était inondé de larmes. Mon doigt se plaça sur la gâchette. Pourquoi est ce que ça me rendait si triste, alors que j'étais persuadé de le détester. Mais tout en moi me hurlait de ne pas le faire. De ne pas le tuer. Envers la plus simple des logique. Envers les conseils de Basile, l'un des seuls êtres saints d'esprit de mon entourage.

Je me souvenais des quelques bons moments que nous avions partagé malgré tout. C'était vrai, Liam avait gâché de grands pans de ma vie. Mais il avait agi par amour. Je savais qu'il m'aimait, oui. Pas parce qu'il me l'avait dit et répété, pas parce qu'il m'assurait avoir tué pour moi. Mais parce que j'avais de vrais souvenirs, bien tangibles.
Il y avait cette fois, qui m'avait énormément marqué. J'avais alors quinze ans et je me faisais harceler à l'école par le gros dur de l'établissement. Il savait que j'étais gay et à cause de ça, se chargeait de faire de ma vie un Enfer sur Terre. J'avais fini par ne plus vouloir aller en cours, mimant la maladie. Liam avait été le seul à comprendre mon désarroi et ma terreur. Il m'avait fait parler, m'avait rassuré et promis que je pourrai retourner à l'école le lendemain. Et effectivement, le gros dur était devenu complètement indifférent à mon existence. A l'époque, je n'avais pas compris comment, mais il avait réussi à me faire me sentir mieux. J'avais alors éprouvé une admiration sans bornes pour mon grand frère protecteur.
Il y avait d'autres moments, au cours de ma jeunesse, où j'avais pu compter sur lui. Et maintenant. Il avait accepté de coucher avec moi, pour me soulager. Il m'avait apporté une paix éphémère. Je ne pouvais tout de même pas le tuer ?

Pourquoi le voulait il ? Pourquoi ? La colère explosa en moi, outrepassant tous mes autres sentiments. Je ne pouvais donc pas être tranquille, après toutes ces épreuves ? Juste un peu, juste une fois ? Il fallait que ça se change en drame ! Il voulait me quitter, m'abandonner lui aussi ! Est ce que j'étais si dégoûtant ?
Mes pleurs redoublèrent d'intensité et je fixai le visage trop serein de Liam, la rage sur les lèvres. Mes dents étaient si serrées que ma mâchoire me faisait mal, mais je n'arrivais pas à me calmer. Même un tueur en série préférait crever plutôt que de me supporter. Pour la peine, je ne devrai même pas lui obéir.

Je baissai les yeux sur l'arme de Basile, avec l'intention de la retirer et de la tenir hors de portée de Liam, quitte à lui péter le cul une seconde fois pour le calmer. Mais je repensais aux paroles de mon ami, aux paroles de mon frère quelques secondes plus tôt. Des paroles, rien que des paroles. Mais n'étaient elles pas porteuses de vérité ? Liam ne méritait il pas de mourir pour me mettre dans des états pareils ?

« Personne ne reste jamais... Personne ne m'aime... »

Ne laissant pas le temps à Liam de répliquer, j'attrapai l'arrière de son crâne avec ma main libre, serrant une poignée de ses cheveux décolorés entre mes doigts, et lui arrachai un baiser. Un baiser passionné, désespéré. Ultime.


La détonation résonna lugubrement à mes oreilles, qui sonnèrent, m'empêchant d'entendre le moindre cri qui aurait pu surgir de la gorge de Liam. Je maintins mon baiser longtemps encore, jusqu'à sentir l'humidité du sang sur mon genou glissé entre les cuisses de mon frère. Puis, je le lâchai et le laissai s'effondrer sur le lit. Mes larmes coulaient sans sanglots sur mes joues quand je me redressai. Je rangeai méthodiquement l'arme dans ma table de nuit et saisis des vêtements propres au hasard dans l'armoire. Tout étant sombre, je restais malgré tout assorti. J'enfilai rapidement mes bottines et jetai un dernier coup d’œil sur le corps inerte de Liam. Il était certainement mort, je ne voyais pas sa poitrine bouger. De toute façon, je préférais ne pas m'attarder sur cette vision. S'il n'avait pas déjà trépassé, il le ferait dans les prochaines minutes.
Les mots de Basile résonnaient à mes oreilles, rassurantes et terribles à la fois. C'est un détenu, personne n'en aura rien à faire.
J'essuyai ma joue inondée et sortis de la chambre. Personne dans le couloir. Je fis tourner la clef dans la serrure et pris la direction de l'escalier. J'allais me rendre à la bibliothèque et poursuivre mon rangement.

Comme si rien ne s'était passé.