Renseignement Important

Lever, expirer, baisser, inspirer... une action que je pratique depuis un moment. Depuis que je suis arrivé à Deardeath en réalité. Tous les jours, au moins deux heures si ce n'est pas trois, lorsque je suis motivé. Mais aujourd'hui je n'en avais pas envie. Le gardien était venu me chercher, un gros tas, mal rasé qui avait pour habitude de reluquer les jeunes filles sous les douches. Le genre de personne exécrable qu'on a envie de rouer de coups.
Il me regarde, souriant, un sourire légèrement sadique.

« Ça te fait plaisir de nous voir suer, oublier que nous sommes des êtres humains enfermés. »
Il ne répond pas et continue de me sourire, je me remets en place et continue mon levé de poids, comme si mes paroles n'avaient jamais été prononcée.

Plusieurs fois dans mes heures perdues à la salle de gym, je me disais que ce n'était qu'un prétexte pour nous affaiblir plus vite, pour qu'on soit fatigué et que nous puissions plus lutter. Je vois certains gros bras perdre espoir, devenir de vieilles loques, qui ne savent plus exactement pourquoi ils sont ici. D'autres au moral d'acier, refusent de se laisser faire et finissent souvent dans la cellule d'isolement ou blessé par les gardiens. Sinon il y a les types comme moi, qui s'isolent et font leur vie tranquillement. Il arrive même qu'il y aie des couples, mais c'est assez rare. Depuis que je suis ici, je n'en ai vu qu'un seul, dont un autre d'homosexuel. La plupart du temps les détenus chérisse leur indépendance. À défaut de se sentir véritablement détenu.
Je pose les poids dans leurs emplacements respectifs et m'essuie avec ma serviette les gouttes de sueur qui perlent sur mon front et mes joues. Mon débardeur blanc est trempé, un peu troué également. Faudrait que j'en demande un autre aux gardiens.

La porte de la salle, étant derrière moi, j'entends quelqu'un entrer. Par simple curiosité, je tourne la tête. Un gardien est là, se tenant droit, stoïque. Il est blond aux yeux bleus. Il scrute la salle du regard. Il doit chercher quelqu'un.
Je me remets en place et commence à attraper la barre de fer. Mais les murmures des deux gardiens derrière moi, m'interpelle.

« Je chercher Mr Anderson. Il avoir de la visite. »

Il me cherche ? J'ai de la visite ? De qui ?... Curieux, je repose la barre, me relève et me retourne.

« Vous cherchez Clyde Anderson ? » dis-je en m'essuyant quelques gouttes intempestives sur mon oeil. C'est amusant de faire semblant d'être quelqu'un d'autre même pour quelques secondes.

« Oui, je chercher Mr Anderson. Il avoir de la visite, tu savoir où il se trouver ? »

Son accent allemand me fit sourire, j'ai envie de le taquiner en l'imitant, mais je me ravise et lui parle normalement.

« Oui, c'est moi. »

- Vous être Clyde Anderson ? Arrêtez de rire de moi, Mr Anderson être plus imposant. »

Je ne savais pas comment prendre cela, un compliment ? Ou une insulte ? Cette fois par simple orgueil je l'imite.

- Vous être tromper, moi être Clyde Anderson, prisonnier F1323. Vous vérifier. »

Il regarde son calepin, sûrement mon dossier ou une fiche d'identité. Il relève la tête et me regarde en fronçant les sourcils.
Il m'attrape l'épaule et me force à sortir de la salle avec poigne. J'allais le faire de toute manière, c'est susceptible un allemand. Mais je suis curieux de découvrir qui est ce visiteur.
Je le suis jusque la salle des visites. On entre. Une salle assez longue et blanche s'offre à moi, séparée en deux par une énorme grille. Il y a plusieurs planches de bois séparant les guichets, donnant l'illusion d'une intimité avec les visiteurs. Un autre gardien est posté au fond, de l'autre côté de la grille. Il doit accompagner mon visiteur.

Le gardien allemand se dirige lui aussi vers le guichet du fond, arrive en face et m'incite à me poster devant la grille.
J'avance, regarde le gardien et tourne la tête pour découvrir qui est cet individu qui veut me rencontrer, ici.
Drôle d'endroit pour rencontrer une personne ou même pour y parler. On ne sera pas tellement seul, surveillé par ces deux gardiens. Et puis qui voudrais me rencontrer. Si cette personne veut me parler sérieusement, elle ne pourra pas.
Elle... c'était une femme. Elle porte un manteau rouge, un rouge à lèvre rouge également et des cheveux mi-longs dépassant de son chapeau melon noir, élégant. Une belle jeune femme en tout cas, mais ce n'est pas ce qui m'intrigue le plus. Non. Ce qui est intriguant c'est qu'elle lui ressemble. Beaucoup trop à mon goût. A tel point que je crois la revoir. Je reste estomaqué par sa ressemblance un moment. Même si au fond je sais que ce n'est pas elle, c'est douloureux de comparer ces deux visages dans mon esprit. A tel point que c'est avec une colère amère que je lui demande qui est-elle.

« Je suis Carolina. La femme de Jack. Je suis ravie de vous rencontrer, depuis le temps qu'il me parle de vous. »

Carolina, mon frère m'en avait parlé dans sa lettre, il m'avait également dit qu'elle ressemblait à Clarisse... Mais que fait-elle ici ? Mon frère serait-il dans le coin ? Il veut me faire passer un message ? Malin le frangin. Personne ne la connaît. Personne ne peut l'inculper de me divulguer des informations.

« Que me voulez-vous ? » Elle sourit, très aimable jeune fille.

- Je n'ai qu'une chose à vous dire. »

Son sourire vient de s'effacer peu à peu, laissant place à un visage sérieux.

- Je vous écoute. »

- Il sera là, il va bientôt entrer ici. Tu dois être patient. Je sais que ce sera dur peut être long mais, il le faut. Son entrée à Deardeath a était annoncée, d'ici quelques jours. Prépare toi. »

Ses mots sortent de sa bouche de manière assez robotique comme si elle avait appris un texte par coeur. Je me mets à sourire, enthousiaste d'entendre une si bonne nouvelle. Mais une boule se forme dans mon ventre. Une sensation pas très agréable, comment vais-je réagir en voyant son visage ? Même si j'ai déjà une petite idée sur la question. Imaginons que je fasse une rechute, comme cela m'arrive de temps en temps, son souvenir douloureux, même s'il a tendance à s'effacer, peut resurgir et me prendre à la gorge à tout moment. Et si cela arrive alors que je suis face à l'Assassin, que se passerait-il ? Non...ce n'est pas le moment de me remettre en question. J'aurais tout le temps pour ça après sa mort. Il faut garder son objectif, la Vengeance. C'est pour elle que je ferais ça, je n'ai pas de raison de m'effondrer. Elle reposera enfin en paix et moi aussi.
Mais alors que mon visage se décompose et que je baisse les yeux, Carolina se lève pour se placer face à moi.

« Prenez garde-à vous. Ce serait bête d'abîmer un si beau visage, vous ne croyez pas ? »

Picture Clyde & Carolina:

Et elle se retourne pour se diriger vers la sortie, au fur et à mesure qu'elle s'éloigne, je ne peux m'empêcher de sourire, presque de rire. Un rire nerveux, elle a pas tort, c'est lui qui mourra pas moi. C'est donc à lui de faire attention...l'Assassin, il me tarde de le voir maintenant.
Elle vient de passer devant une bonne trentaine de garde, sans se retourner.
Et lorsqu'elle passe la porte et que les gardiens la referme derrière elle, je me retourne pour regarder l'allemand qui semble ne pas comprendre la situation ou ne pas en prendre réellement compte. Il reste droit, au garde à vous.