Nocturnal Bloodlust ♫ Disaster


C'était le matin. J'avais vu l'aurore se lever, debout derrière la fenêtre de ma cuisine, une tasse de café noir fumant dans la main. Les enfants dormaient encore, bien sûr. La nounou n'allait pas tarder. Pour elle aussi, c'était son premier jour.


Lorsque j'arrivai en vue du pénitencier, un orage éclata juste au dessus des murs du grand bâtiment. Sombre, imposant. Voilà une prison qu'elle était bonne pour des malfaiteurs de la pire espèce. Pas de pitié pour la vermine.
Je retirai la Marlboro d'entre mes dents et jetai le mégot sur le bitume. Une pluie soudaine s'abattit dessus, étouffant la fumée. Mes cheveux sans couleur se retrouvèrent imbibés d'eau en moins de deux et je marchai dans une piste de flaques jusqu'à l'imposant portail. Devant l'employé assigné à ce poste, je brandis la carte plastifiée que j'avais reçu par courrier et qui témoignait de mon identité en tant que tout nouveau gardien de DearDeath. Jail. Ca sonnait trop bien.

« C'est bon, 'pouvez entrer, monsieur... Joe. »

Ohoh, l'air dubitatif que voilà. Oui, j'en connaissais la raison. Il trouvait que les initiales de mes prénoms étaient drôles. Cocasses. Pourtant c'était bien ainsi que j'avais été nommé à la naissance. Georges, en hommage à Washington. Isaac, pour Newton. De magnifiques prénoms, regorgeant de respect. Honnêtement, il n'y avait pas de quoi rire.

Je traversai le chemin menant jusqu'aux portes même du bâtiment, ne me souciant pas que la pluie trempe mon blouson en cuir. C'était du solide.
Je poussai brutalement les deux battants et me tins au centre quelques instants, le sac datant de mon service militaire sur l'épaule. Je remontai mes lunettes de soleil sur mon front et laissai le temps à mes yeux de s'habituer à la différence de lumière. Derrière moi, le son de la pluie s'écrasant sur la terre s'arrêta. Un funeste présage que d'avoir été accompagné par l'orage, mais je n'en avais rien à fucking foutre. Ce n'était pas ça qui allait m'arrêter.

Ma semelle dégoulinante s'abattit dans un « splorch » bruyant sur le sol de l'entrée de la prison. Il y avait quelques personnes. Je vis que certains portaient l'uniforme caractéristique des prisonniers : une combinaison sans aucun style, orange ou grise ici. C'était bien. Pas de luxe pour la vermine. J'approuvai d'un hochement de tête appuyé, destiné à personne en particulier.

Une voix assurément féminine emplis alors le hall. Je m'avançai dans sa direction, désireux d'aider. Elle avait dit être la nouvelle infirmière. Une femme sérieuse donc, fiable, instruite et intelligente. Même si je désapprouvai totalement qu'elle ne soit pas à la maison à garder ses gosses, je ne pouvais pas la laisser en plein désarroi. Et ce que je vis me décontenança.
Elle n'avait rien de l'infirmière que je m'étais imaginé. Elle me rappelait plutôt une de ces infirmières sexy des affiches de films pour adultes.

Je mis néanmoins de côté mes convictions pour un petit moment. Il y avait peut être une explication claire et précise. Je devais me la fermer. Au moins les cinq premières minutes.
L'air un peu renfrogné malgré tout, je me postai devant elle et baissai la tête.

« Je suis le nouveau gardien, je viens d'arriver, mais je peux peut être vous aider. »

Je déposai mon sac à terre. POF ! Quelques détenus à l'allure de sous-nourris (bien !) le fixèrent. Ils semblaient surpris que je réussisse à porter ça d'un bras. Je n'en étais pas particulièrement fier, il était tout à fait normal pour moi d'avoir cette force.
Je balayai l'espace du regard après avoir repoussé quelques mèches trempées qui collaient à mon visage. Une infirmière devait en toute logique aller dans une infirmerie. C'était bien ce qu'elle avait dit plus tôt, non ? Je repérai un panneau d'indication et pointai mon index dans sa direction.

« Là. »

Je saisis de nouveau mon sac pour le lancer sur mon épaule et fixai méchamment les quelques prisonniers qui déshabillaient la demoiselle du regard.

« Poussez vous, sale engeance. Et arrêtez de la regarder comme ça. »

Je mis mon coude dans le menton d'un homme un peu trop insistant, pour l'exemple. Cela sembla calmer un peu les autres. J'entrepris alors de me diriger vers l'infirmerie.

« Restez près de moi, ordonnais je sans brutalité. Ils ne vous feront rien. »

De toute façon, s'ils osaient tenter quelque chose, ce ne serait pas mon coude qui entrerait en collision avec une partie de leur corps.

Il était tôt. Enfin, c'était le matin. Je venais de finir mon tour de garde de fin de nuit, et j'enchainais directement avec la surveillance matinale des portes. Ce matin était le jour de la mise en service de deux nouveaux membres du personnel. Une infirmière qui était arrivée hier et un nouveau gardien qui habitait dans le village. Peu avait pris cette décision d'habiter hors de la prison, et presque tous avait une chambre pour la semaine, voir le week-end. Il devait surement avoir de la famille. Deux Américains. L'infirmière arrivée tard dans la soirée, avait marqué la salle d'une odeur de.. Barbe à papa ? Et surtout avait marqué l'esprit des gardiens qui s'était chargé de son arrivé. Personne n'avait encore vu le gardien, mais d'après son C.V, Américain pure souche, élévé dans les traditionnes "Etats-uniennes".

Des bruits de talon au dehors de la salle. Ah, tiens ! La nouvelle se rend à son travail. Un orage éclate au-dehors. Encore une mauvaise journée, après tout, on est en hiver. Soyons heureux qu'il ne neige pas. Sinon cette prison ne serait plus qu'un bloc de glace. Ah oui, c'est vrai. Elle l'est déjà. Mon regard parcourt le ciel gris que l'on distingue a travers la minie fenêtre entre les barreaux. La porte grince, les talons se sont arrêtés. Un homme, grand au cheveu blanc, apparait. Je regarde les gardiens présents. Personne n'a l'air de se bouger le cul pour l'accueillir et lui expliquer les règles. Je sens que je vais encore le faire, j'en pas envi. Je m'assois et attends. Les claquements de chaussures non pas reprit, et je vois les détenus s'agglutiner à travers la vitre. Qu'est-ce qui se passe encore ?

Je sors, une odeur de barbe à papa envahis l'air. Une odeur à en faire presque vomir ceux qui ne peuvent pa supporter l'odeur de sucre. Le nouveau fout un coup de coude dans le menton d'un détenu. Comment se faire respecter à votre arrivé ? Appeller G.I Joe. Tiens ! Ce n'est pas le nom d'un film assez connu ? Bah, je sais plus et ce n'est pas très important. Je restais appuyer contre le mur, observant le gardien de dos. Effectivement, il était grand, voir imposant. L'infirmière était petite, vraiment petite. La voix grave de Mister cheveux blanc sonna.

"Restez près de moi, ils ne vous feront rien."

Encore un qui veut se la jouer, près des jeunes infirmières. Je quitte le mur et m'avance, ordonnant au passage à quelques prisonniers de retourner à leur occupation misérable.

"Bienvenue, Joe Georges Isaac. Nouveau gardien, je suppose ? Et si vous commenciez par aller récupérer votre uniforme ? Ensuite, vous pouvez accueillir, voir même secourir, cette demoiselle en détresse."

Elle avait de longs cheveux rouges. Elle ressemblait vachement aux infirmières que l'on pouvait apercevoir dans les films que regardaient les gardiens en permanence. D'ailleurs, ce nouveau au regard dur allait surement être comme tous les autres. Me détester, m'ignorer. Pour deux conditions, je suis une femme et ensuite, je suis une meurtrière amnésique.

"Sinon, bienvenue à toi...Love? C'est ça ?"

[j'ai oublier de préciser, Ombrage porte une attelle dû à une blessure (bras fracturé)]

HIDE ♫ In motion

Pauvre femme, ne pus je m'empêcher de penser. Elle n'était clairement pas à sa place ici, si elle me prenait pour une espèce de prince charmant venu la secourir. D'un autre côté, elle semblait vraiment enthousiaste. Soit elle était plus débrouillarde qu'elle ne voulait bien le laisser croire et manquait juste sérieusement d'un sens de l'orientation, soit elle était naïve. Si pour cette fois elle avait eu de la chance, il se pourrait cependant que ça tourne mal une prochaine fois. De toute façon, une femme comme elle ne devrait pas être ici. De mon avis, aucune femme ne devrait poser un pied ici d'ailleurs.

« De cheval blanc ? Désolé, madame, mais mon truc, c'est plutôt les 4X4 noirs. »

De fait, le mien était actuellement enfermé dans mon garage. J'avais préféré prendre un taxi pour mon premier jour, n'ayant aucune information au sujet d'un parking. Il était absolument hors de question que je laisse ma voiture sur le rebord de la route.
L'infirmière attrapa mon bras et je soulevai un sourcil suspicieux. J'espérais franchement qu'il ne s'agissait pas d'une méthode de drague. Parce que dans ce cas, je me verrai forcé de l'éconduire. Et je n'étais pas doué pour faire ce genre de choses en douceur. Machinalement, je caressai l'alliance toujours glissée à mon annulaire gauche. Caroline...

« Si vous le voulez. »

Non, je n'étais pas sensible à son enthousiasme mais de toute façon, elle en avait bien pour deux. J'étais quant à moi plutôt occupé à jeter des coups d’œils de tous côtés. Je ne me ferai pas prendre en traître par l'un de ses sauvages. Je me demandais néanmoins comment elle connaissait mon nom. Je ne le lui avait jamais donné. A moins qu'elle ait été au courant de mon arrivée. Après tout, elle avait sans doute prévu une visite médicale dans son planning. On m'avait prévenu qu'une fois arrivé, je devrais constituer un dossier à l'infirmerie. Elle était sans doute celle qui s'en occuperait, même si je pensais avoir plutôt affaire au médecin de la prison.
Alors que nous nous dirigions vers l'infirmerie, une femme revêtant l'uniforme des gardiens se plaça dans notre champ de vision. Elle me fit frémir de par son apparence. Comment avait on pu autoriser une telle femme à évoluer ici ? Il était étonnant qu'elle ne se soit pas déjà fait tuer ! Elle était bien trop maigre ! Elle s'adressa en premier lieu à moi, commençant par mon nom. Et bien, mon arrivée était un événement ou quoi ? Par contre, elle ne semblait pas être tout à fait au courant en ce qui concernait mon travail. Alors quoi ? On divulguait d'abord l'identité des nouveaux arrivants avant leur fonction ? C'était la prison du potin ici, ou bien ?
A nouveau, je soulevai mon sourcil circonspect, mais dire aucun reproche. Cette femme, bien que frêle, avait un charisme qui manifestait d'une évidente autorité. Sans doute ma supérieure hiérarchique. Je ne devrai sans doute pas me fier à la couverture, elle était peut être plus redoutable que ce qu'elle paraissait. Un peu comme ces Chinois dans les films de bagarre. Même si, encore une fois, j'estimais qu'une femme, qui qu'elle soit, n'avait rien à foutre ici.

« Bien, madame, me contentais je de répondre. J'y vais immédiatement. »

J'attendis ensuite que l'infirmière lâche mon bras, mais celle ci n'avait pas l'air vraiment décidée. Poli, j'attendis au moins qu'elles aient fini de papoter.
Ainsi, elle se nommait Love et le souligna en pointant un badge épinglé à sa blouse. Je ne pus m'empêcher d'y porter le regard, parce que je voulais vérifier l'existence de ce petit morceau de plastique que je n'avais pas remarqué jusqu'ici. Effectivement. « Nu. Love Vinnie ». Et il était astucieusement placé, ce badge, de telle sorte que je ne pus que m'attarder un peu sur le décolleté apparent. Je rougis très légèrement et détournai les yeux. C'était indécent.

Elle nous remercia, la gardienne et moi, puis me lâcha en m'autorisant bien gentiment à aller me changer. Je partis sans mot dire en direction de l'escalier, prenant la direction indiquée du Bureau des gardiens, suivant les indications reçues dans ma lettre.

Une fois en haut, je trouvai aisément les grands casiers au style highschool un peu défraîchis. Le mien, sur lequel était déjà étiqueté mes initiales, « G. Joe », se trouvait tout à droite et en hauteur. A l'intérieur, il y avait un uniforme propre, s'il n'était pas neuf, glissé dans un plastique. Je me changeai rapidement, revêtant la chemise et la veste un brin trop serrées pour mes épaules et mon dos musclés.
J'abandonnai aussi dans ce casier les quelques affaires que j'avais emportées dans mon sac : armes de secours, chaussures de secours, slip de secours, nourriture déshydratée de secours, sifflet, calepin et un lot de douze crayons à papier. On ne savait jamais. Puis, je glissai mon sac vide au dessus des casiers et repartis dans le couloir.

Une fois de nouveau au rez de chaussée, devant la porte de l'infirmerie, je toquai légèrement. En partant tout à l'heure, j'avais entendu miss Love demander à Ombrage, apparemment le nom de la gardienne, de l'accompagner à son lieu de travail. En toute logique, j'allais donc les retrouver toutes les deux. Peut être devant une tasse de thé... Cette scène aurait tendance à m'exaspérer, mais l'infirmière Love n'avait elle pas dit vouloir approfondir les présentations ? Si je trouvais une échappatoire à cette niaiserie, je le ferai. Les petits goûters entre femmes n'étaient pas... et bien... ma tasse de thé.