the GazettE ♫ Agony

Ces derniers jours, ma tristesse s'était un peu atténuée. J'avais réussi à convaincre Basile de ne pas mener une croisade pour nous réunir, Luckas et moi. Je croyais bien être parvenu à lui faire entendre raison sur ce point : il était trop dangereux pour moi d'être en couple, tant que Liam serait en vie. Là dessus, cependant, je n'avais pas trop à m'en faire. A la fin de l'année, il mourrait.
Quand j'avais appris la nouvelle, les émotions contradictoires s'en étaient donné à cœur joie. Je me sentais soulagé, car je me disais que j'allais bientôt pouvoir vivre sans crainte. Mais je ressentais aussi une certaine culpabilité pour être content de son exécution. Il restait mon frère et avait pris soin de moi, à sa manière. Je ne remettais pas en cause le système judiciaire, mais je n'aurai pas dû en être si ravi. Est ce qu'une histoire d'amour comptait plus que ma famille ? Le seul membre qui m'ait jamais témoigné une réelle affection et un intérêt sincère, d'ailleurs. Et puis j'étais toujours perturbé par le fait d'avoir accepté de coucher avec lui. Ces souvenirs me déstabilisaient, car ils entraient en conflit avec la personnalité que j'avais construite sans eux. … Tout cela était tellement compliqué. Liam, pourquoi ne pouvais tu pas faire les choses simplement ?

Ce matin, je retournais au travail pour la première fois depuis l'incident de la révolte de Liam. Cela faisait une semaine et demi. Je n'avais aucune idée de l'état réel dans lequel se trouvait la bibliothèque. Je n'avais pas osé y mettre un pied depuis mon retour. Je savais seulement qu'il y avait un énorme trou dans la porte et que, d'après Kei le médecin, ce n'était vraiment pas joli à l'intérieur.
M'attendant à pas mal de travail de rangement, je m'habillai plutôt simplement. Une chemise gris clair dont des boutons aux coudes me permettaient de maintenir les manches relevées, un gilet noir sans manche laissé ouvert et un jean collé au corps gris foncé. Pas de cravate aujourd'hui, la bibliothèque serait fermée.

Une fois dans la bibliothèque, je retins mon souffle. Le résultat était pour le moins impressionnant. Même mon bureau n'était plus à sa place. Il y avait des tâches de sang partout et des éclats de balles dans les murs. Des douilles encombraient le sol et les livres servaient de moquette.
Je passai une main dans mes cheveux, désespéré, en constatant à quel point on s'en était donné à cœur joie en s'attaquant aux étagères, renversées les unes sur les autres.
En fouillant dans le placard à fournitures, le seul panneau que je trouvai pour indiquer l'état de service de la bibliothèque ne correspondait absolument pas à la réalité. Mais tant pis, les gens devraient s'en contenter. J'accrochai donc FERME POUR INVENTAIRE juste devant le trou. Voilà qui me redonnait un peu pied dans la réalité tranquille d'un bibliothécaire moyen.

Avant de commencer le travail à proprement parler, je me dirigeai vers le fond de la bibliothèque. Je voulais inspecter les dégâts en détail.
J'allai de surprise en surprise, toutes plus mauvaises les unes que les autres. En bas de la mezzanine, je découvris une énorme tâche de sang, qui avait même giclé sur les livres. … Bon sang, j'allais finalement devoir faire un inventaire. A ce moment, j'entendis la porte principale claquer. Quelqu'un venait d'entrer. Un illettré ? L'idée idiote qu'il puisse s'agir de Luckas venu me malmener dans la pénombre de la bibliothèque me traversa l'esprit et accéléra joyeusement les battements de mon cœur. Mais je secouai la tête. Impossible. Ce devait simplement être un casse couilles.
Je me dirigeai vers l'entrée et une fois dans l'allée principale, parlai d'une voix forte :

« C'est fermé, vous ne savez pas... ! … Lire... ? »

Personne ? J'aurai pourtant juré avoir entendu quelqu'un. C'était un peu bizarre, mais ça pouvait tout aussi bien être le fruit de mon imagination. Avec tout ce qui était arrivé à ma mémoire ces derniers temps, je n'étais pas à l'abri d'une petite folie.
Je fis volte face pour retourner à mon occupation première.

Cela faisait maintenant deux jours que j'étais enfin libre de mes mouvements. J'avais cherché mon marionnettiste sans succés. Il avait simplement disparu, même les gardiens ne parlaient plus de lui. Il ne pouvait pas être parti, impossible. Mais où était-il ? Hier, j'avais attendu toute la journée à sa cellule son retour, mais il était toujours absent. Quand reviendra-t-il ? Puis au détour d'un couloir, j'avais aperçu le bibliothécaire, son frère. Peut-être savait-il où il était. Et mieux, peut-être reviendrait-il quand j'aurais accompli sa mission.

J'attendis toute la nuit, sans dormir. Simplement, Obéir. Récupérer quelque chose qu'il y avait dans son œil caché. Et ensuite, je continuerais d'attendre à sa cellule. Est-ce que le frère de Liam était comme lui ? Pourtant dans la cours, le jour de la rébellion, je ne l'avais pas trouvé fort, ni même héroïque. Rien, il avait l'air banal. Cette nuit était calme, un silence absolu régné. Depuis la révolte, les cellules s'étaient vidées. Morts, condamnation, rallongement de peine et changement d'établissement. Mais chez le personnel aussi les pertes étaient assez nombreuses. Est-ce que c'était le but de Liam ? Ou il y avait quelque chose d'encore plus secret que même nous ne devions ignorer. Après tout, nous n'existons seulement pour obéir aux ordres. Rien de plus.

Une simple marionnette, mais ou es-tu marionnettiste ? Quelque chose de grave vous est arrivé ? Vous êtes mort ? Mais si c'est le cas, mon jugement m'aurait trompé. Peut-être qu'au final, vous n'étiez pas si fort. Ou alors l'humain qui vous a retiré la vie est un humain qui mérite le respect. Enfin, je continue de croire que vous ne voulez simplement pas vous montrez. Vous faire oubliez peut-être. Mais si quelqu'un vous blesse en traitre, il mourra. Les hommes mérite de mourir. Tous, selon un jugement que seuls les marionnettistes peuvent accorder. Des humains au dessus des autres ? Oui, car ils en ont les capacités. Et nous, nous existons seulement pour leur obéir. C'est la règle simple de la vie. La vie ? Mais suis-je en vie ? Cetain répondront "Oui, car tu peux mourir". Mais le droit de mourir n'accorde pas forcement le droit de vivre. Je suis vivante, pas en vie. C'est légèrement différent.

La nuit fut longue et silencieuse. Mais finalement quand les gardiens rescapés ouvrirent, je sortis et sans prendre le repas gentilment offert par la maison, je me diriger vers la bibliothèque. Je m'assis loin de la porte et attendis que le frère de mon marionnettiste pointes son nez. Malheureusement, je m'assoupis. J'aurais peut-être dû dormir cette nuit. Je sais dormir au milieu d'un couloir en prison, ce n'est pas judicieux, mais je n'ai pas vraiment fait exprès. Enfin, le frère du marionnettiste état vicieux. Il profita de mon moment de somnolence pour rentrer dans son antre. Ou du moins, je supposai grâce au panneau accroché à la porte. "Fermer pour inventaire". Mais cela ne me concernait pas, j'avais un ordre à respecter.

Je poussai la porte et rentrai, mais telle une personne mal réveillée je trébuchai, m'appuyant sur la porte, mais celle-ci repartis et claqua dans un vacarme assourdissant. Je m'éloignai doucement et me cachai derrière des étagères à moitié détruite qui tenait encore debout. Le bibliothécaire accouru, mais ne vis pas. Quelle entrée Eden, franchement, tu n'es pas digne de ton marionnettiste. Quand il repartit, je le suivis des yeux. J'attendais le bon moment pour lui parler, et puis, je ne devais pas lui faire de mal. Sinon, je décevrai Liam et je ne serais plus une marionnette. Je n'aurais pu qu'a bruler comme les poupées de bois cassé que l'on jette.

C'est quand il fut derrière son sorte de comptoir que je me permis de sortir de l'ombre. J'approchai. Personnellement, je trouvais Liam beaucoup beau et charismatique. Je ne comprenais pas comment il pouvait être frère. Rien ne se dégager de ses yeux. Aucune puissance. Rien, cet humain était... Tellement normal comparé au marionnettiste. Pourquoi ne pouvons-nous pas l'éliminer ?

"Je suis chargé de récupérer quelque chose qui se cache sous votre œil que vous caché. Je ne vous ferais pas de mal, Liam me l'a interdit"

J'attendis sa réponse. Il me regardait, interpellé. Mon visage était toujours le même, froid, glacial. Seul Abel m'avait vu sourire. Mon véritable sourire. Et si cet humain ne m'écoutait pas, je manipulerais les émotions, comme les marionnettistes avec les pantins ou Dieu avec les hommes. S'il existe bien sûr.

Nocturnal Bloodlust ♫ Crimson gate

J'avais finalement décidé de procéder petit à petit, sans m'énerver et sans chercher les complications. Ranger me prendrait le temps qu'il faudrait et puis, après tout, ce n'était pas de ma faute si tout ça était arrivé. Elle en incombait à Liam seul. Cet enfoiré de grand frère parvenait à foutre ma vie en l'air jusqu'au bout. Il empiétait sur mon lieu de travail, ma relation amoureuse et même dans ma bibliothèque. Moi qui étais persuadé qu'il adorait lire... Enfin, il n'avait peut être pas jugé cet endroit assez digne de lui pour être sauvé.
Rageur, je saisis un ouvrage transpercé de part en part par un projectile dont la nature m'était assez évidente et le jetai au sol. De toute façon, il était bon à jeter, je pouvais bien me défouler dessus ! Un coup de pied l'envoya valdinguer à travers la rangée, jusque dans les ombres les plus obscures de la pièce. MAUDIT SOIT IL ! Si j'entendais à nouveau parler de lui au cours de la semaine, il y avait des chances pour que je ne puisse plus résister à mes pulsions pyromanes. Car oui, j'avais fini par accepter cette part de moi, sans pour autant vouloir la révéler à qui que ce soit et encore moins me réfugier dans une psychothérapie. J'étais persuadé que je pouvais encore m'en sortir par moi même. Il n'y aurait qu'un seul criminel chez les frères Gantley.

Après avoir réuni quelques ouvrages en une pile, je rejoignis mon bureau et y déposai la tour branlante de livres. Je poussai le large bouton d'alimentation de l'ordinateur et stoppai ma respiration. Quand j'entendis le « BIP » sonore habituel, un soupir de soulagement passa mes lèvres entrouvertes. Il n'avait rien de cassé. Oh, je n'aurai pas été fâché d'avoir un bon prétexte pour me débarrasser de cette machine plus bruyante qu'un marteau piqueur en action sur l'asphalte, mais attendre son remplacement m'aurait pas mal handicapé pour le rangement de la bibliothèque. Surtout que j'aurai dû refaire tout l'inventaire. A nouveau.
Une fois que le bureau se fut affiché et que j'eus lancé le fichier contenant toutes les références, je saisis le premier livre de la pile. J'allais les classer grossièrement, petit à petit, puis les ranger ensuite à leurs emplacements corrects. Et je devrai recommander les trop abîmés, comme ceux qui avaient été victime d'une balle de pistolet ou de je ne savais quelle autre arme à feu.
Alors que je m'apitoyais sur mon sort, une voix glaciale et posée me fit lever brusquement la tête. Avant même de me retourner vers la présence, je me souvins de la porte qui avait claqué un peu plus tôt. Ainsi donc, quelqu'un était bien rentré dans la bibliothèque tout à l'heure.

Je fis face à une jeune femme qui aurait pu être très belle si elle n'avait pas été en prison. De longs cheveux blonds d'une couleur inégalable, une peau pâle comme la lune, des lèvres délicates mais desséchées par les conditions de vie de DearDeath. Ses yeux me figèrent sur place. Je les fixais en voulant m'en détacher mais sans y parvenir. Ils semblaient me transpercer et me retenir d'un crochet. Une sensation qui s'avéra plutôt atroce et je me sentis comme un poisson pris au piège après avoir osé engloutir le ver offert par le pêcheur.
Elle avait parlé de mon œil, derrière lequel était caché quelque chose. Je portai ma main à mon cache-oeil en cuir noir, apposant ma paume comme une seconde protection. Ce qu'elle racontait était complètement fou, mais j'étais pourtant persuadé qu'elle avait raison, quelque part. Mais non, j'avais bien dû inspecter ma blessure dernièrement. Même si je dormais souvent avec mon cache-oeil. Il suffisait que je me souvienne... Mais rien ne me vint. D'aussi loin que je me rappelais, je n'avais jamais regardé sous ma paupière vide. Jamais. Pourquoi ? … Quelque chose m'en empêchait. Mais quoi ?
Elle me promettait aussi de ne pas me faire de mal. Parce que Liam le lui avait interdit. Liam ? Liam ?! La fureur s'empara de moi et mon poing se serra contre ma cuisse. Liam... Si je l'avais en face de moi, je... Je ne ferai probablement rien mais j'avais toujours très envie de lui arracher les parties génitales à la force de mes doigts. Quant à elle... Elle était son alliée ? Non, probablement rien de plus que son pantin. Il n'y avait qu'à s'attarder sur son regard vide d'émotion pour comprendre qu'elle était hypnotisée. Même s'il parvenait à me transpercer.

Je me mordis la lèvre inférieure pour tenter de reprendre mon calme et m'assis sur mon siège. J'ouvris un tiroir et constatai avec déception que personne n'y avait caché d'arme depuis ma dernière visite. Quel dommage... J'en sortis néanmoins mon paquet de cigarettes roses et mon briquet à la flamme arc en ciel. Un peu de tabac m'apaiserait probablement assez les nerfs pour appréhender cette histoire de fou.

Alors qu'un large écran de fumée claire s'envolait au dessus de ma tête, je répondis à la blonde sans même la regarder. Elle restait néanmoins dans mon champ de vision restreint.

« Je refuse que tu viennes trifouiller dans mon œil. Surtout sur un ordre de Liam. Je ne ferai absolument rien pour lui plaire. Tu peux t'en aller. »

Je me foutais bien de son sort si elle revenait vers mon frère bredouille. De toute façon, pour ce que j'en savais, il était toujours dans les sous sols et donc incapable de faire quoi que ce soit. Peut être même que...

« Si ça se trouve, à l'heure qu'il est, il est mort. Tu ne devrai pas te soucier de ses désirs. Il n'en vaut pas la peine. »

Je conclue ma remarque d'une autre exhalaison de fumée et m'avachis un peu plus sur mon avant bras, posé à plat sur mon bureau. La vie m'épuisait.

L'homme dit comme le frère du maitre me fixait. Vraiment, il était tellement différent. Il dégageait beaucoup moins de talent que Liam. Mais si Liam tenait à lui, il devait avoir quelque chose de spécial. Peut-être que je n'arrive pas à le percevoir, car je suis une simple marionnette. Je devais faire confiance à Liam et récupérer ce qu'il m'avait demandé. Et puis si ma réussite le faisait revenir, je serais heureuse. Car je vis pour mon maitre, et s'il meurt, cela voudra dire que mon jugement était mauvais et que je n'aurais plus qu'à mourir. De toute manière qui se soucies de moi ? Abel ? Non, il mérite mieux que moi. J'ai de la chance qu'il veuille bien rester avec moi. Je l'aime après tout.

L'homme sortit un paquet de cigarettes et un briquet et commença à fumer. Il détourna ses yeux de moi, comme si je n'avais aucune importance pour lui. Je ne réagis pas. Je voulais simplement le contenu de son œil fermé, pas savoir ce qu'il pensait de moi. Un monstre, une fillette inoffensive... Ce qu'il voulait. Je veux simplement ce que tu caches. Je veux que Liam revienne, et j'ai besoin de lui pour cela. Pourtant, les mots de cet humain sans valeur, me firent bouillir de rage intérieurement. Ne rien faire pour lui ? Ne rien faire ? Mais pour qui te prends-tu ! Liam est supérieur à toi humain ingrat ! Je ne partirais pas ! Je vais te..Calme toi Eden, calme toi. Mon visage resta froid, fermé et mes yeux continuèrent de le dévisager avec la même intensité. Cède, tu n'as pas le droit de déshonorer Liam. C'est interdit.

Les mots qu'il prononça ensuite résonnaient dans ma tête, faisant grandir cette colère qu'il avait provoquée. Mort. Il n'est pas mort ! Il ne peut pas mourir ! Tu comprends ça misérable ! Tu es faible, il est fort ! Sinon je ne l'aurais pas choisi ! Sinon je ne lui obéirais pas ! La mort n'est pas venue à lui ! Il a disparu certes, des gens le font souffrir et ils payeront tous, et toi aussi si tu ne te rachètes pas ! Liam est puissant, mais ce bâtiment l'entrave ! Alors qu'il s'avachit sur le bureau, je frappe du poing sur le bois et le regarde, furieuse. Liam est tout ! Et tu n'es rien ! Rien ! Rien !

"Mort? Mais c'est toi qui vas mourir si tu continues, ne l'insulte pas. Tu as beau être son frère, tu n'es rien. Tu n'as aucun talent, et lui, il brille de magnificence. Enlève ce cache-oeil, et montre qui tu n'es pas un sale petit humain qui fuis la peur. Tu dois bien valoir quelque chose, si tu es son frère, tu ne dois pas être si faible que tu le montres, alors regarde dans ton œil. Maintenant."

Ma voix était resta calme, mais laissait passer ce que je ressentais. La colère. Un calme qui pouvait être dangereux. J'évitais au maximum de le blesser, mais s'il ne se laissait pas faire, je devrais employé une autre méthode., même si cela risque ma vie auprès de mon maitre. On ne l'insulte pas, même si tu as un privilège dans son cœur. Il ne réagit pas.

"Tu es faible, humain. Complètement faible. Tu devrais disparaitre, tu ne manquerais à personne."

Pourquoi Liam refuse de le tuer ? Il ne vaut rien, complètement Rien. Pourquoi s'obstine-t-il à conserver sa vie ? Je ne peux pas me tromper, c'est impossible. Comment peut-il être frère ? La nature a tellement mal fait son travail. Je ne comprendrais jamais les hommes. Mes yeux n'étaient plus vraiment de glace, et je le fixais avec insistance et mépris. Réagis bon sang, ou alors tu es le dérivé d'une évolution raté d'un mollusque sans cervelle pour réfléchir. Fait Honneur à ta famille. Respect le, et obéis. Comme tout le monde devrait lui obéir.

Je tournai ma tête vers la fille quand elle se mit à me répondre. Elle avait réagit quand javais supposé la mort de Liam. Et maintenant, elle m'insultait ? La fureur monta en moi. Comment une putain de détenue, enfermée à DearDeath sur décision de justice, pouvait oser me parler comme ça ? ELLE était la merde rejetée par la société ! Moi, je travaillais ici, je n'avais rien fait de mal ! Jamais ! … Jamais ? Est ce que nos places officielles comptaient vraiment maintenant ? Nous étions dans une micro société. Et j'étais aussi merdique que tous ces déchets coincés derrière leurs barreaux d'acier. Pourtant, ma colère ne se calma pas. Bien au contraire. La réalité des choses, le fait que je m'en rende compte, tout ça ne faisait que l'attiser. J'étais bouleversé.
Je me levai de ma chaise quand elle m'ordonna de regarder dans mon œil sur l'instant. Mes sourcils étaient froncés à l'extrême et je devais vraiment avoir l'air menaçant. Mais comme elle n'était pas vraiment quelqu'un de normal, j'ignorais si ça lui ferait vraiment de l'effet. Je rejetai ma cigarette d'une pichenette vers l'arrière, sans faire attention à la direction, et saisis mon briquet. Je la fixai alors qu'elle me défiait du regard. Elle gagnait du terrain et plus elle en gagnait, plus je jouais frénétiquement avec mon briquet. La petite flamme ne cessait de venir mes réchauffer les doigts, de plus en plus fréquemment.

« Non ! » criai-je en tentant d'échapper à la pression qu'elle m'imposait.

Et là, elle me balança la chose la plus méchante et sans doute la plus vraie possible. Toute ma colère me déserta, pour laisser place à un profond désespoir, mêlé au dégoût de moi même qui me suivait depuis plusieurs mois. Une larme coula sur ma joue et je fis un pas en arrière. Mes cuisses heurtèrent le bord de mon bureau et je m'arrêtai, dépité. Elle avait tellement raison. Je ne méritais que la mort. Je ne voyais que cela comme explication. Sinon, pourquoi Dieu m'aurait il infligé tout ça ? Mon œil, mon frère, mes conquêtes sans lendemain, mes collègues moqueurs, l'incendie, ce travail. … Luckas. Est ce que j'étais une erreur ? Un humain si dégoûtant que je méritais encore moins que Liam de vivre sur cette planète ?

De la manche, j'essuyai ma joue et posai mes doigts sur le nœud qui retenait mon cache-oeil. Devais je ? Vraiment ? Ou plutôt, y arriverai je vraiment ?
Je réfléchis, vite, mais beaucoup. Liam voulait quelque chose que j'avais dans mon œil. Si je méritais de mourir, alors je mourrai en protégeant les gens. Pas en facilitant les vils actes de Liam. Dans une pulsion, je saisis deux gros livres et les jetai au visage de la fille, avant de m'enfuir. Je connaissais les rayonnages de cette bibliothèque comme ma poche et espérais qu'elle, non. Il faisait très sombre dans le fond, les ampoules avaient été cassées. J'avais une chance, j'avais une chance... Si je m'y prenais bien, je réussirai à sortir d'ici indemne pour aller quémander l'aide d'un gardien. Ou de n'importe qui qui ne porterait pas une combinaison de prisonnier.